Les friches portuaires à Nantes et à Bordeaux
DEUXIÈME PARTIE : Le mécanisme de réaménagement - vers une disparition des friches portuaires
2.3. Potentialités et enjeux du réaménagement
"Jardin de l'informulable, n'est-elle pas à ce bord du monde l'enclos d'une mort distraite, d'un possible je crois, lequel d'entre la perversion des faunes et les arborescences déglutissant le ciel maintiendrait vivante une histoire, l'histoire tout bonnement, et serait le creuset d'autres fermentations, l'athanor d'une épreuve plus riche, une chance, un risque, une promesse que nous aurions grand intérêt cette fois à tenir." (L.BOURG Friches)
Tout le mécanisme de réaménagement est motivé par la valorisation économique du site à partir de ses composantes (qui constituent des potentialités) qui devra avoir pour objectif la promotion du milieu urbain (centralité, image) et portuaire, en accord avec les ambitions des acteurs attisées par les potentialités. Ces enjeux qui constituent le moteur des décisions, deviennent aussi des obstacles par la multiplicité des choix, des options de réaménagement et leurs répercussions. La mise en valeur des espaces est un mécanisme complexe, à tel choix ne correspond pas un résultat précis. Le choix d'une option peut répondre à une attente mais en même temps nuire à une autre.
L'existence de modèles peut aider mais chaque cas est unique et le contexte de l'agglomération, la nature et la localisation des sites délaissés influencent directement les stratégies retenues par les décideurs. Ces partis auront des impacts territoriaux induits, difficiles à maîtriser, se traduisant par des effets sur les plans socio-économiques et fonctionnels, qui doivent correspondre au mieux à ce que l'on veut que cela devienne.
Les espaces délaissés sont susceptibles de valorisations nouvelles, d'une réorganisation en fonction des comportements, des goûts, des contextes économiques, des changements technologiques. La difficulté est de trouver la meilleure valorisation possible en fonction de ce qui est offert et en fonction de ce que l'on veut promouvoir.
2.3.1. Des éléments à prendre en compte
L'espace portuaire délaissé parait trop souvent vide et vierge aux yeux des décideurs qui pensent qu'ils peuvent en faire ce qu'ils veulent. Les grands espaces paraissent offrir à la ville, la possibilité d'y construire de nouvelles activités, de nouveaux équipements au gré de ses besoins. Trop souvent les choix de réaménagement se basent essentiellement sur les aspirations des acteurs. Ce qui peut aboutir à des erreurs, voire à des échecs. On ne peut construire n'importe comment, les volontés politiques ne sont pas les seules à imposer des choix.
Tout le mécanisme de réaménagement est motivé par la valorisation économique du site à partir de ses composantes (qui constituent des potentialités) qui devra avoir pour objectif la promotion du milieu urbain (centralité, image) et portuaire, en accord avec les ambitions des acteurs attisées par les potentialités. Ces enjeux qui constituent le moteur des décisions, deviennent aussi des obstacles par la multiplicité des choix, des options de réaménagement et leurs répercussions. La mise en valeur des espaces est un mécanisme complexe, à tel choix ne correspond pas un résultat précis. Le choix d'une option peut répondre à une attente mais en même temps nuire à une autre.
L'existence de modèles peut aider mais chaque cas est unique et le contexte de l'agglomération, la nature et la localisation des sites délaissés influencent directement les stratégies retenues par les décideurs. Ces partis auront des impacts territoriaux induits, difficiles à maîtriser, se traduisant par des effets sur les plans socio-économiques et fonctionnels, qui doivent correspondre au mieux à ce que l'on veut que cela devienne.
Les espaces délaissés sont susceptibles de valorisations nouvelles, d'une réorganisation en fonction des comportements, des goûts, des contextes économiques, des changements technologiques. La difficulté est de trouver la meilleure valorisation possible en fonction de ce qui est offert et en fonction de ce que l'on veut promouvoir.
2.3.1. Des éléments à prendre en compte
L'espace portuaire délaissé parait trop souvent vide et vierge aux yeux des décideurs qui pensent qu'ils peuvent en faire ce qu'ils veulent. Les grands espaces paraissent offrir à la ville, la possibilité d'y construire de nouvelles activités, de nouveaux équipements au gré de ses besoins. Trop souvent les choix de réaménagement se basent essentiellement sur les aspirations des acteurs. Ce qui peut aboutir à des erreurs, voire à des échecs. On ne peut construire n'importe comment, les volontés politiques ne sont pas les seules à imposer des choix.
Figure n°40 : Système de détermination des choix de réaménagement
Les anciens espaces portuaires ont certaines spécificités qui amènent un traitement particulier. En raison de l'existence d'un ancien système, ces espaces conservent des traces, ils ont des singularités naturelles et patrimoniales, qui dans le contexte actuel, peuvent être potentiellement riches et apparaître comme une richesse.
J. TUNBRIDGE [43] en soulignant les relations conflictuelles qui marquent la revitalisation des fronts d'eau, montre des attitudes différentes face aux éléments en place :
- le social contre le commercial : Conflit qui concerne les habitants des villes et notamment des anciens quartiers maritimes, la revitalisation provoquant le plus souvent un départ plus ou moins forcé avec l'arrivée d'une nouvelle population, socialement différente, plutôt aisée et tertiaire.
- la conservation contre le redéveloppement : Conflit, qui se dessine plutôt en Europe, où s'opposent la tendance à maintenir l'ancien paysage (anciens bâtiments, anciens quartiers) et la nécessité de les détruire pour faire naître de nouvelles activités et une rentabilité économique légitime. Il sous-entend un conflit d'usage entre une orientation maritime ou une orientation étrangère au monde portuaire, à l'ancienne activité.
Ces deux conflits peuvent se résumer en un seul : Faut-il réaménager plutôt en fonction du site, de l'existant ou plutôt en fonction des exigences et aspirations extérieures ? Toute la difficulté des choix réside dans le fait de contenter les acteurs et dans la difficulté de trouver un équilibre, afin d'éviter que les plus puissants imposent leur stratégie.
2.3.1.1. Les potentialités des espaces
Tous les espaces portuaires délaissés ont des caractéristiques et une logique propres. Trois grands caractères communs ressortent généralement et nécessitent une prise en compte. Une intervention bâtie ne serait pas forcément impertinente, mais elle risque, sans analyse, d'être rapportée avec une logique autre que celle du site. Ce qui à terme pourrait aboutir à un échec du système qu'on a voulu transposer.
L'ancien système a marqué ces espaces. Les anciennes conditions socio-économiques et technologiques ont créé un fonctionnement propre et des utilisations qui ont créé des paysages, des morphologies urbaines dont la spécificité se fait encore ressentir et doit être prise en compte.
> La proximité du centre-ville
La proximité du centre historique rend difficile les choix de réaménagement. Tout d'abord, parce qu'elle apparaît comme une potentialité énorme, ce qui gonfle les aspirations et les convoitises. Cette proximité résulte de l'ancienne imbrication du port et de la ville, qui formaient un système propre non comparable au fonctionnement du centre-ville actuel. Maintenant que le port est plus ou moins parti, les responsables urbains veulent le plus souvent "annexer" ce territoire.
Cette situation pousse à une tendance spéculative, les terrains sont potentiellement susceptibles d'une forte valeur. Les motivations commerciales ont tendance à gommer, l'ancienne composition sociale, ces quartiers abritant des populations plutôt modestes (Bastide, Bacalan, Prairie-au-Duc).
La présence physique toute proche du centre pose aussi un problème de contraste. Les anciens espaces portuaires sont ouverts, spécialisés et techniques, tandis que l'espace urbain est étriqué et multi-fonctionnel. La difficulté réside dans le fait d'introduire de la variété et de la complexité propres aux villes, tout en gérant la différence avec le centre existant, l'architecture contemporaine ne pouvant ressembler à celle des siècles passés. La recomposition totale de ses quartiers doit trouver sa place dans la ville, sa définition par rapport à elle. A Bordeaux, BOFILL jouait sur une fausse symétrie, PERRAULT sur un contraste. Il faut définir un équilibre entre une rupture et une intégration par rapport à la ville, sur les plans fonctionnel, spatial, mental et temporel.
Mais cette proximité est à relativiser. Si les quais jouxtent en partie le centre-ville, certains espaces sont tout de même relativement éloignés : A Nantes, si le quartier de la Prairie-au-Duc est à 250 mètres de la Médiathèque et à 500 mètres de la Place Graslin ou de la Place du Commerce, la Pointe des Antilles en est à 2 kilomètres. A Bordeaux, la rive droite est à environ 500 mètres du centre mais la distance est à rallonger car la seule possibilité de franchissement est le Pont de Pierre, quant aux bassins à flot, ils sont à 3 kilomètres. Cette distance influence beaucoup la réappropriation, la proximité des flux du centre-ville permettant une intégration commerciale facile. B. VAN DER KNAPP et D. PINDER fixe le seuil de distance au centre autour de 200 à 300 mètres, au-delà duquel ces espaces risquent d'avoir des difficultés pour attirer les consommateurs en volume suffisant.
> La présence de l'eau
Ces espaces se caractérisent par la présence de l'eau, support de l'ancienne activité portuaire. Sans celle-ci, le problème de la reconversion de ces terrains pourrait rejoindre celui des friches urbaines ou industrielles, mais elle prend un caractère original lié directement à la revalorisation de l'eau dans la composition urbaine et la recherche de formes et d'activités spécifiques.
L'eau n'est pas sans contrainte, elle peut constituer un obstacle, par son organisation propre, à une perspective complète de remodelage (largeur de la Garonne à Bordeaux qui est une véritable coupure physique, visuelle et psychologique). Elle pose des problèmes d'accessibilité et de franchissement. C'est un "accroc" dans le tissu urbain, "Les bords d'eaux sont à nos yeux les seuls paysages où la chimère triomphe du cadastre[44]". On ne peut s'en soustraire, c'est une composante avec qui l'on doit compter, le tout étant de jouer avec cette césure et d'en tirer profit.
Les avantages visuels et paysagers sont évidents. Il y a donc toujours intérêt à intégrer l'eau dans la ville. C'est un espace libre, naturel qui donne de la respiration au tissu urbain. Son ouverture permet un panorama sur la ville minérale et étriquée. «Après avoir été vecteur de flux marchands, l'eau se prête à tous les jeux de miroirs et de décor urbain[45]». Ces avantages alimentent les enjeux, l'eau induit des espaces hautement valorisables dans une logique contemporaine des forces du marché, avec des effets de plus-values évidents sur le prix des terrains en bord de fleuve, d'où le danger de polarisation sociale des rives, voire d'une privatisation.
Cette présence incontournable de l'eau dans la mise en valeur des sites peut orienter des choix de réaménagement et leur nature :
- L'eau pour raison d'être : la conservation d'activités portuaires ou associées comme les croisières, le cabotage ou les téléports (cf. § 2.3.2.2.) car ces espaces sont encore avant tout portuaires.
- L'eau pour support : la création d'activités sur l'eau avec notamment des marinas. Le principal danger est une forte ségrégation sociale et des usages spéculatifs. L'espace public que constituent les berges ne doit pas être seulement destiné aux loisirs d'un petit nombre.
- L'eau pour cadre de vie : parcs, promenades, cafés, en accord avec un embellissement urbain et une qualité de vie des citadins.
- L'eau pour thème : dans les domaines culturels et éducatifs, avec des activités de recherche et d'études sur le milieu aquatique et maritime, des visites de vieux gréements, des musées maritimes, etc.
- L'eau pour profit : sa proximité est un atout paysager donc un élément de plus-value foncière ou immobilière. Les logements et le tertiaire prennent plus de valeur, ce qui peut aboutir à un phénomène de gentrification.
> Les traces du passé
Les espaces portuaires délaissés sont marqués par la présence de friches qui sont autant de marques de l'ancienne activité. La grande question est de savoir s'il faut faire table rase de ce passé, pour construire un nouveau système répondant aux exigences présentes et tourné vers l'avenir, ou s'il faut au contraire partir de ces traces et s'appuyer sur leur existence pour créer un nouveau mode d'usage et lui donner un sens. Le maintien d'un trop grand nombre d'édifices existants, de médiocre valeur pouvant être en contradiction avec la volonté de modernité de la ville qui souhaite une nouvelle image.
On remarque aujourd'hui un certain intérêt pour le passé industriel et portuaire alors que pendant longtemps ces espaces étaient considérés comme laids et répulsifs. Au moment de la disparition des industries, on assiste à un certain retour en grâce du paysage industriel et productif. En France, l'élargissement de la notion de patrimoine à ces domaines longtemps jugés mineurs s'est fait très lentement, l'inventaire mis en place par la cellule industrielle de la direction du patrimoine accuse beaucoup de retard comparé à d'autres pays.
Aujourd'hui, le grand débat est : que faut-il garder parmi ces traces toutes aussi chargées de sens les unes que les autres et pour quoi faire ? Tout d'abord, il est indispensable d'inventorier avant de faire des choix. Il n'y a pas vraiment de règle en la matière, c'est la subjectivité qui règne, on ne peut évaluer quantitativement la valeur historique et symbolique d'une friche. Leur sort dépend aussi de leur état et du coût de restauration ou de destruction. Cette évaluation est un exercice difficile. De plus, il faut recenser les opportunités de réutilisation, les demandes, les problèmes financiers et techniques. Faut-il conserver des témoignages si leur esthétique est discutable ? (Par exemple, les hangars bordelais du début du XXe siècle symbolisent-ils vraiment le port et ne défigurent-ils pas la façade des Chartrons ?). Tout ce qui transforme une friche portuaire en patrimoine n'est pas entièrement identifiable. Chaque cas reste unique et dépend de la valeur patrimoniale que la collectivité confère à chacune des formes (cf. fig. n°41).
Conserver les traces et réhabiliter se révèlent parfois indispensables, mais encore faut-il les mettre en valeur et expliquer au public la présence et la signification de ce patrimoine. Les intentions des municipalités, qui ne peuvent renier complètement l'ancienne activité portuaire, oscillent souvent entre une approche historisante et le développement d'une image contemporaine du mythe. L'activité a disparu et le patrimoine n'est plus qu'un élément de décor. Le problème est la représentation intelligible d'une mémoire, par essence immatérielle. Celle-ci peut aller jusqu'à la caricature donc jusqu'à la falsification, en détournant le passé pour satisfaire des demandes et des ambitions du moment.
J. TUNBRIDGE [43] en soulignant les relations conflictuelles qui marquent la revitalisation des fronts d'eau, montre des attitudes différentes face aux éléments en place :
- le social contre le commercial : Conflit qui concerne les habitants des villes et notamment des anciens quartiers maritimes, la revitalisation provoquant le plus souvent un départ plus ou moins forcé avec l'arrivée d'une nouvelle population, socialement différente, plutôt aisée et tertiaire.
- la conservation contre le redéveloppement : Conflit, qui se dessine plutôt en Europe, où s'opposent la tendance à maintenir l'ancien paysage (anciens bâtiments, anciens quartiers) et la nécessité de les détruire pour faire naître de nouvelles activités et une rentabilité économique légitime. Il sous-entend un conflit d'usage entre une orientation maritime ou une orientation étrangère au monde portuaire, à l'ancienne activité.
Ces deux conflits peuvent se résumer en un seul : Faut-il réaménager plutôt en fonction du site, de l'existant ou plutôt en fonction des exigences et aspirations extérieures ? Toute la difficulté des choix réside dans le fait de contenter les acteurs et dans la difficulté de trouver un équilibre, afin d'éviter que les plus puissants imposent leur stratégie.
2.3.1.1. Les potentialités des espaces
Tous les espaces portuaires délaissés ont des caractéristiques et une logique propres. Trois grands caractères communs ressortent généralement et nécessitent une prise en compte. Une intervention bâtie ne serait pas forcément impertinente, mais elle risque, sans analyse, d'être rapportée avec une logique autre que celle du site. Ce qui à terme pourrait aboutir à un échec du système qu'on a voulu transposer.
L'ancien système a marqué ces espaces. Les anciennes conditions socio-économiques et technologiques ont créé un fonctionnement propre et des utilisations qui ont créé des paysages, des morphologies urbaines dont la spécificité se fait encore ressentir et doit être prise en compte.
> La proximité du centre-ville
La proximité du centre historique rend difficile les choix de réaménagement. Tout d'abord, parce qu'elle apparaît comme une potentialité énorme, ce qui gonfle les aspirations et les convoitises. Cette proximité résulte de l'ancienne imbrication du port et de la ville, qui formaient un système propre non comparable au fonctionnement du centre-ville actuel. Maintenant que le port est plus ou moins parti, les responsables urbains veulent le plus souvent "annexer" ce territoire.
Cette situation pousse à une tendance spéculative, les terrains sont potentiellement susceptibles d'une forte valeur. Les motivations commerciales ont tendance à gommer, l'ancienne composition sociale, ces quartiers abritant des populations plutôt modestes (Bastide, Bacalan, Prairie-au-Duc).
La présence physique toute proche du centre pose aussi un problème de contraste. Les anciens espaces portuaires sont ouverts, spécialisés et techniques, tandis que l'espace urbain est étriqué et multi-fonctionnel. La difficulté réside dans le fait d'introduire de la variété et de la complexité propres aux villes, tout en gérant la différence avec le centre existant, l'architecture contemporaine ne pouvant ressembler à celle des siècles passés. La recomposition totale de ses quartiers doit trouver sa place dans la ville, sa définition par rapport à elle. A Bordeaux, BOFILL jouait sur une fausse symétrie, PERRAULT sur un contraste. Il faut définir un équilibre entre une rupture et une intégration par rapport à la ville, sur les plans fonctionnel, spatial, mental et temporel.
Mais cette proximité est à relativiser. Si les quais jouxtent en partie le centre-ville, certains espaces sont tout de même relativement éloignés : A Nantes, si le quartier de la Prairie-au-Duc est à 250 mètres de la Médiathèque et à 500 mètres de la Place Graslin ou de la Place du Commerce, la Pointe des Antilles en est à 2 kilomètres. A Bordeaux, la rive droite est à environ 500 mètres du centre mais la distance est à rallonger car la seule possibilité de franchissement est le Pont de Pierre, quant aux bassins à flot, ils sont à 3 kilomètres. Cette distance influence beaucoup la réappropriation, la proximité des flux du centre-ville permettant une intégration commerciale facile. B. VAN DER KNAPP et D. PINDER fixe le seuil de distance au centre autour de 200 à 300 mètres, au-delà duquel ces espaces risquent d'avoir des difficultés pour attirer les consommateurs en volume suffisant.
> La présence de l'eau
Ces espaces se caractérisent par la présence de l'eau, support de l'ancienne activité portuaire. Sans celle-ci, le problème de la reconversion de ces terrains pourrait rejoindre celui des friches urbaines ou industrielles, mais elle prend un caractère original lié directement à la revalorisation de l'eau dans la composition urbaine et la recherche de formes et d'activités spécifiques.
L'eau n'est pas sans contrainte, elle peut constituer un obstacle, par son organisation propre, à une perspective complète de remodelage (largeur de la Garonne à Bordeaux qui est une véritable coupure physique, visuelle et psychologique). Elle pose des problèmes d'accessibilité et de franchissement. C'est un "accroc" dans le tissu urbain, "Les bords d'eaux sont à nos yeux les seuls paysages où la chimère triomphe du cadastre[44]". On ne peut s'en soustraire, c'est une composante avec qui l'on doit compter, le tout étant de jouer avec cette césure et d'en tirer profit.
Les avantages visuels et paysagers sont évidents. Il y a donc toujours intérêt à intégrer l'eau dans la ville. C'est un espace libre, naturel qui donne de la respiration au tissu urbain. Son ouverture permet un panorama sur la ville minérale et étriquée. «Après avoir été vecteur de flux marchands, l'eau se prête à tous les jeux de miroirs et de décor urbain[45]». Ces avantages alimentent les enjeux, l'eau induit des espaces hautement valorisables dans une logique contemporaine des forces du marché, avec des effets de plus-values évidents sur le prix des terrains en bord de fleuve, d'où le danger de polarisation sociale des rives, voire d'une privatisation.
Cette présence incontournable de l'eau dans la mise en valeur des sites peut orienter des choix de réaménagement et leur nature :
- L'eau pour raison d'être : la conservation d'activités portuaires ou associées comme les croisières, le cabotage ou les téléports (cf. § 2.3.2.2.) car ces espaces sont encore avant tout portuaires.
- L'eau pour support : la création d'activités sur l'eau avec notamment des marinas. Le principal danger est une forte ségrégation sociale et des usages spéculatifs. L'espace public que constituent les berges ne doit pas être seulement destiné aux loisirs d'un petit nombre.
- L'eau pour cadre de vie : parcs, promenades, cafés, en accord avec un embellissement urbain et une qualité de vie des citadins.
- L'eau pour thème : dans les domaines culturels et éducatifs, avec des activités de recherche et d'études sur le milieu aquatique et maritime, des visites de vieux gréements, des musées maritimes, etc.
- L'eau pour profit : sa proximité est un atout paysager donc un élément de plus-value foncière ou immobilière. Les logements et le tertiaire prennent plus de valeur, ce qui peut aboutir à un phénomène de gentrification.
> Les traces du passé
Les espaces portuaires délaissés sont marqués par la présence de friches qui sont autant de marques de l'ancienne activité. La grande question est de savoir s'il faut faire table rase de ce passé, pour construire un nouveau système répondant aux exigences présentes et tourné vers l'avenir, ou s'il faut au contraire partir de ces traces et s'appuyer sur leur existence pour créer un nouveau mode d'usage et lui donner un sens. Le maintien d'un trop grand nombre d'édifices existants, de médiocre valeur pouvant être en contradiction avec la volonté de modernité de la ville qui souhaite une nouvelle image.
On remarque aujourd'hui un certain intérêt pour le passé industriel et portuaire alors que pendant longtemps ces espaces étaient considérés comme laids et répulsifs. Au moment de la disparition des industries, on assiste à un certain retour en grâce du paysage industriel et productif. En France, l'élargissement de la notion de patrimoine à ces domaines longtemps jugés mineurs s'est fait très lentement, l'inventaire mis en place par la cellule industrielle de la direction du patrimoine accuse beaucoup de retard comparé à d'autres pays.
Aujourd'hui, le grand débat est : que faut-il garder parmi ces traces toutes aussi chargées de sens les unes que les autres et pour quoi faire ? Tout d'abord, il est indispensable d'inventorier avant de faire des choix. Il n'y a pas vraiment de règle en la matière, c'est la subjectivité qui règne, on ne peut évaluer quantitativement la valeur historique et symbolique d'une friche. Leur sort dépend aussi de leur état et du coût de restauration ou de destruction. Cette évaluation est un exercice difficile. De plus, il faut recenser les opportunités de réutilisation, les demandes, les problèmes financiers et techniques. Faut-il conserver des témoignages si leur esthétique est discutable ? (Par exemple, les hangars bordelais du début du XXe siècle symbolisent-ils vraiment le port et ne défigurent-ils pas la façade des Chartrons ?). Tout ce qui transforme une friche portuaire en patrimoine n'est pas entièrement identifiable. Chaque cas reste unique et dépend de la valeur patrimoniale que la collectivité confère à chacune des formes (cf. fig. n°41).
Conserver les traces et réhabiliter se révèlent parfois indispensables, mais encore faut-il les mettre en valeur et expliquer au public la présence et la signification de ce patrimoine. Les intentions des municipalités, qui ne peuvent renier complètement l'ancienne activité portuaire, oscillent souvent entre une approche historisante et le développement d'une image contemporaine du mythe. L'activité a disparu et le patrimoine n'est plus qu'un élément de décor. Le problème est la représentation intelligible d'une mémoire, par essence immatérielle. Celle-ci peut aller jusqu'à la caricature donc jusqu'à la falsification, en détournant le passé pour satisfaire des demandes et des ambitions du moment.
Figure n°41 : Opinions sur les éléments à conserver sur l'île Sainte-Anne à Nantes
Le patrimoine peut représenter un élément important pour éviter la banalisation des aménagements urbains. Il constitue des points d'ancrage historiques à l'intérieur d'un paysage renouvelé, ce qui facilite une intégration dans la ville, apporte une identité, une originalité. Il ne doit pas être seulement un motif de décoration, mais aussi un symbole influençant les nouvelles réalisations, les habitants. C'est ce que souhaite André PERON : «Est-ce rêver que d'envisager une architecture capable de modeler un patrimoine existant, ce qui permet non seulement de donner une âme et un souffle à un quartier, mais aussi de faire des économies substantielles et d'éviter de resservir une architecture déjà répétée ailleurs jusqu'à la nausée ?[46]».
Un réaménagement qui négligerait le passé, peut être en contradiction avec les souhaits des populations et aboutir à un dysfonctionnement des projets mis en place, les habitants n'y trouvant pas de repère, ni de sentiment d'appartenance. Une prise en compte des traces du passé ne doit pas être seulement considérée comme nostalgique, c'est aussi une base indispensable pour envisager un avenir, qui ne soit pas uniquement imaginé selon des désirs et des illusions.
2.3.1.2. Les modèles
En matière de réaménagement des espaces portuaires délaissés, de nombreux exemples, pour la plupart étrangers, constituent des voies à explorer, des modèles plus ou moins réussis. Il ne faut pas pour autant gommer la spécificité de chaque cas; ce qui peut réussir quelque part n'est pas garant de succès dans un autre contexte. Mais ces exemples, ramené à l'échelle des deux villes étudiées, peuvent constituer une palette de choix et donc animer le débat et éviter des erreurs.
Dès la fin des années 1950, on assiste aux Etats-Unis à l'émergence du réaménagement des waterfronts (Le secteur d'Union Wharf à Boston fait l'objet d'un projet de reconversion dès 1956). Un consensus s'établit pour accepter une délocalisation quasi totale et sans retour des activités maritimes et sur une réaffectation basée sur de nouvelles valeurs d'usages des sites. Le modèle qui s'impose est en rupture avec les fonctions antérieures et il privilégie essentiellement le tertiaire de bureaux, le commerce et le tourisme, avec un léger dosage résidentiel, limité à un habitat haut de gamme. Baltimore en est un très bon exemple, par la reconversion du Inner Harbor, on cherche à revitaliser l'ensemble de la downtown et à rehausser l'image de marque de la cité, avec pour objectif d'en faire une ville de congrès, durant toute l'année.
Montréal, au contraire, apparaît en rupture avec ce modèle tertiaire et spéculatif. L'opinion publique joue un grand rôle, avec des "consultations" déterminantes durant les années 1980. Après une décennie de réflexion, de projets et d'intenses consultations, les grandes lignes du réaménagement sont basées sur un refus des constructions nouvelles à fortes densités et une priorité donnée aux espaces publics notamment aux équipements sportifs, récréatifs, culturels avec en plus la conservation des héritages industriels et maritimes.
En Europe occidentale, le relais d'innovation a été l'Angleterre, où la précocité de l'ère industrielle a nourri des friches considérables. La fermeture des docks du port de Londres commence en 1967-1969 (East India, St Katharine, London Docks). Après une décennie de conflit entre l'Etat et les collectivités publiques, l'opération des London Docklands commence dans les années 1980 sous l'impulsion du gouvernement. Elle reste un modèle européen de taille (2.200 ha). La reconversion s'effectue sur trois thèmes majeurs: introduction volontariste d'activités industrielles légères (Enterprise Zone qui bénéficie d'avantages fiscaux), la création d'une seconde City, sur Canary Wharf (bureaux, commerces, hôtels) et la réalisation de lotissements résidentiels, généralement neufs. L'équilibre entre résidence et emploi est recherché, mais la mutation est totale sur le plan socio-professionnel avec un fort phénomène de gentrification.
Peu à peu, les approches et les réalisations ont évolué en fonction des changements de conjoncture économique mais aussi avec un approfondissement de la réflexion sur le rôle que pouvait jouer ces espaces :
- Absence de prise de conscience : construction de voies rapides, de parkings requis par l'augmentation croissante de la circulation automobile. La coupure entre l'eau et la ville est conservée : axes autoroutiers dans les années 1950 à Washington, Toronto...
- Espaces verts et équipements récréatifs (années 1950 et 1960 aux Etats-Unis). Avec une logique simple d'embellissement et d'ouverture sur le fleuve : esplanades (Montréal), véritables parcs (Toronto, Boston) ou modestes linéaires piétonniers.
- La récession qui commence au milieu des années 1970 rend prioritaire la création d'activités. Les opérations sont intégrées dans des projets multi-fonctionnels (Baltimore), générateurs d'emplois et relevant surtout du tertiaire commercial.
- Fin de la monovalence et pluralité d'objectifs. A partir des années 1980, on voit apparaître non seulement un effort de créations d'emplois dans les quartiers anciens, mais plus encore de véritables stratégies à l'échelle de l'agglomération pour la régénération des quartiers centraux. On privilégie une large variété d'usages, avec un mixage de tertiaire, de résidentiel et de récréatif. Les acteurs commencent réellement à prendre conscience des avantages qu'ils peuvent tirer à travers ces opérations de réaménagement.
Toutes les opérations ont vu le jour grâce à une volonté politique et à des outils d'intervention. Aux Etats-Unis, le programme H.U.D. (ministère fédéral du Housing and Urban Department) a largement financé des opérations de waterfronts. De plus, les villes ont bénéficié du dynamisme des milieux d'affaires locaux. A Baltimore, à partir de 1964, l'opération de reconversion programmée sur 30 ans est confiée à une société d'aménagement privée, sans but lucratif, concessionnaire de la municipalité : Inner Harbor Management Inc. Dans ce partenariat, la collectivité locale s'efforce de promouvoir des objectifs d'intérêt général, comme le libre accès des berges au public, mais elle s'attache aussi à favoriser les investissements privés. Pour Londres, la responsabilité de la reconversion est confiée à un établissement public (London Docks Development Corporation) qui a reçu mission du gouvernement Thatcher d'accueillir majoritairement les investissements du secteur privé. Une planification non-volontariste sur simples objectifs est suivie. L'établissement public a la responsabilité d'établir un maximum de cohérence entre les propositions émanant des promoteurs publics et surtout privés.
En France, où aucune grande opération de reconversion n'a encore été engagée, les responsabilités demeurent très partagées entre des décideurs publics dont les logiques sont assez divergentes (cf. § 2.1.1.1.). Le secteur privé n'a guère encore manifesté l'intérêt que l'on observe chez les promoteurs nord-américains, excepté pour quelques classiques projets de marinas et d'équipements touristiques.
Que peut-on tirer de ces expériences ? L'évaluation de ces opérations est un exercice difficile car elles sont encore trop récentes pour offrir tous les éléments nécessaires à l'établissement d'un bilan. Elles intègrent le plus souvent des programmes variés avec l'association d'investissements publics et privés. Des opérations pilotes de prestige et/ou la mise en valeur d'éléments du patrimoine permettent d'effacer l'image négative des friches. La priorité est donnée à la création d'activités, pour rentabiliser les investissements et pour créer une animation urbaine indispensable. Elles ont toutes représentées des prises de risque importantes et l'augmentation actuelle de la demande sur ces espaces et l'existence d'un marché foncier représentent tout de même un certain succès.
Mais le problème des répercussions est encore peu maîtrisé. Le plus grand danger est celui d'une reconversion spéculative à court terme, qui peut déboucher sur des erreurs d'appréciations sur lesquelles on ne peut revenir. Par exemple, l'exemple londonien est un des plus controversé puisqu'il a eu de lourdes conséquences socio-économiques avec une recomposition brutale, excessive et exclusive (gentrification). De plus, le Port aurait pu conserver des trafics, notamment de divers conventionnel, dans certains bassins (cf. § 2.3.2.2.). Il faut donc essayer de porter un point de vue critique sur ce qui a déjà été fait pour éviter les mêmes erreurs. «Le problème est que ces réalisations ont été présentées le plus souvent comme exemplaires et que nombre de "développeurs" ne songent qu'à exporter hors contexte un "modèle" encore présenté aux élus comme la panacée, alors qu'il s'agit du pur produit d'une idéologie aujourd'hui rejetée[47]». Le temps de réflexion est primordial, afin d'éviter les clichés, le déjà-vu (CLARK, 1988), de composer avec ses moyens et de ne pas être aveuglé par des ambitions démesurées.
2.3.2. Ambitions urbaines et portuaires
Les opérations de réaménagement sont plus souvent motivées par les ambitions des acteurs qui voient dans les friches portuaires, des endroits stratégiques où ils peuvent concentrer de nouvelles activités et de nouveaux équipements répondant aux demandes actuelles et à une volonté de développement. La revitalisation économique des friches se situe dans une optique de renouveau. Les acteurs imaginent des usages en fonction de l'avenir, de la dimension qu'ils veulent se donner. Cette seule approche est assez risquée, les ambitions de développement étant souvent démesurées par rapport aux réelles possibilités. Cela peut aboutir à des interventions trop ambitieuses, qui seraient un reflet des fantasmes des décideurs, et qui fonctionneraient mal. Il est important de mesurer les réelles possibilités de réussite d'un réaménagement et de ne pas en voir en lui le remède qui pourrait régler tous les problèmes. Il est préférable de partir de l'existant, de fixer des objectifs réalistes et de trouver un équilibre entre le rêve et la réalité.
2.3.2.1. Nouvelles centralité et image urbaines
Le nouveau contexte économique postindustriel basé sur le tertiaire et l'information fait des villes des lieux d'échanges, de flux. La ville base aujourd'hui son développement sur la concentration et l'attraction de fonctions tertiaires supérieures pour devenir un espace transactionnel important et dynamique, avec l'ambition d'accroître son espace d'influence, de se hausser dans la hiérarchie des systèmes urbains régionaux ou nationaux et de devenir une véritable métropole.
Les municipalités portent aujourd'hui beaucoup d'intérêt à un retour vers les centres et à la notion de centralité, identifiée par l'intensité de flux matériels (populations actives, visiteurs, touristes...) et immatériels (capitaux, informations). Elles veulent renforcer et recomposer le centre-ville existant en véritable centre d'agglomération qui doit concentrer les fonctions métropolitaines majeures et les attractions touristiques.
Les friches portuaires entrent en contradiction avec cette image saine, moderne et dynamique. Mais elles s'avèrent un terrain idéal pour abriter les nouvelles fonctions centrales. Le centre existant est proche, les terrains disponibles sont nombreux et l'eau offre un cadre agréable et naturel.
Pour être attractive, la ville doit améliorer son image. Il s'agit de passer d'une image de ville centrée sur sa fonction portuaire et sur son caractère populaire à une image de métropole européenne tournée vers la gestion financière, le tourisme d'affaires, et s'appuyant sur une vie culturelle active. L'aspect esthétique prend une grande importance et les municipalités s'efforcent de mettre en valeur leurs atouts architecturaux et paysagers. A ce sujet, l'eau recèle de grandes potentialités. Elle permet des effets de miroir et de perspectives. Le front d'eau peut servir de vitrine urbaine, représentant la nouvelle centralité. Les berges peuvent concentrer des équipements touristiques importants et être le cadre de manifestations ludiques, grosses polarisatrices de flux de fréquentation intra-urbains. L'image ainsi offerte cadre avec trois objectifs : une ville agréable au bord de l'eau, une ville ludique et une métropole moderne. L'espace portuaire délaissé devient dans cette optique un espace de reconquête essentiel pour la ville.
Aujourd'hui, les chances de développement économique des villes se basent de plus en plus sur une forte identité culturelle et une qualité esthétique. Le cadre de vie pèse lourd dans les choix économiques. Une ville sans beauté et sans âme serait handicapée. Le réaménagement des anciens espaces portuaires peut apporter un second souffle, une redéfinition de la ville en fonction des attentes d'une société moderne de temps libre et de loisirs, dans l'optique de la notion d'urban leisure economy, correspondant à des valeurs ludiques et de consommation :
- L'environnement : On recherche aujourd'hui une certaine symbiose entre la ville et la nature. Ces dernières années, sont apparues des sensibilités collectives nouvelles sur les thèmes de l'environnement, de la qualité de vie et de l'eau. Le réaménagement peut répondre à ces attentes à travers une valorisation et une ouverture sur l'eau avec la création d'espaces publics : promenades, parcs, traversées en bateaux. Ce thème peut être aussi utilisé par le marketing, trouvant des thèmes "vendeurs" dans l'image maritime (île Sainte-Anne).
- La technologie : La ville se doit d'abriter des secteurs technologiques importants en relation avec le secteur tertiaire et industriel, pour conforter son dynamisme et sa modernité. Les activités scientifiques, de recherche, d'enseignement supérieur peuvent être regroupées dans des technopoles intégrées à la nouvelle centralité.
- Les fonctions tertiaires : Leur nombre important est synonyme pour la ville de commandement économique et de puissance. L'implantation de directions administratives, de sièges sociaux, de centre de congrès, d'activités commerciales peuvent permettre une influence accrue et une vocation nationale voire internationale. Pour les villes, il s'agit de remplacer les traces du secteur productif, qui n'est plus synonyme de puissance et relégué à la périphérie, en un foisonnement de services concentrant toutes les chances de développement économique.
- Les activités culturelles : Elles participent à la nouvelle dynamique des villes, à la fois comme pôle d'attraction touristique et comme outil économique. Les villes portuaires ont intérêt à faire valoir leur spécificité culturelle pour être attractives, pour ne pas devenir des métropoles régionales indistinctes et sans éclat. La notion de patrimoine notamment en ce qui concerne les friches portuaires prend ici un rôle important, notamment pour Nantes et Bordeaux, situées en périphérie de l'espace économique européen. «Le développement patrimonial des cités atlantiques est peut être la seule stratégie réaliste pour l'avenir de ce territoire confronté aux nombreux défis géopolitiques, économiques et technologiques qui ne semblent pas lui laisser à terme une place de choix[48]».
Tous ces éléments sont nécessaires mais non suffisants pour créer de la centralité à la place des friches portuaires. Si l'on veut que celle-ci soit permanente et significative, le réaménagement exige des éléments forts et nombreux pour entretenir les activités et les flux de fréquentation. Il faut toujours penser aux articulations avec la centralité existante et prévoir des moyens d'échanges près des berges : gares ferroviaires et maritimes, transports en public. L'image ne suffit pas, il est important d'y concentrer une large gamme d'activités et de logements polarisant un grand nombre d'employés et d'habitants en combinaison avec le tourisme.
> Bordeaux : un élargissement de la centralité vers le fleuve
Bordeaux a l'ambition de devenir une grande métropole. Pour cela elle peut s'appuyer sur une agglomération importante (plus de 700.000 habitants), une large aire d'influence, une histoire et des qualités architecturales certaines. Mais la ville de Bordeaux en elle-même ne compte que 210.000 habitants, ce qui est peu et a des conséquences financières. Dans ce cas, un mouvement de retour vers le centre est indispensable. Toute une partie de son territoire (la rive droite) forme actuellement un immense vide au coeur de l'agglomération, c'est en réoccupant cet espace et en intégrant le fleuve que Bordeaux veut renforcer son centre et accroître ses activités et sa population.
Les berges et leurs valorisations apparaissent comme un moyen de recentrage. Les bords du fleuve offrent des richesses touristiques évidentes et peuvent servir de "vitrine" à la ville. La rive droite actuellement désolée peut être destinée à une revalorisation totale intégrant l'implantation de nombreuses activités tertiaires. Mais actuellement le problème réside dans la maîtrise du flux de véhicules qui empruntent les quais et dans l'insuffisance des points de franchissement du fleuve.
Des efforts commencent à être fait avec le récent "Plan Lumière" dont l'éclairage de la Place de la Bourse offrent un spectacle nocturne grandiose. L'aménagement des anciens quartiers Saint-Pierre et Saint-Michel depuis le début des années 1980 n'a pour l'instant pas assez pris en compte les berges mais il peut constituer un point d'ancrage avec le centre existant. Mais à Bordeaux, la maîtrise de la centralité est difficile du fait de la largeur du fleuve et surtout de l'existence du centre directionnel de Mériadeck qui rend problématique toute dispersion des éléments de centralité.
La municipalité pourrait dans un premier temps essayer d'intégrer les terre-pleins des quais de la rive gauche et en aménager l'accès. Une animation en bord de fleuve pourrait à terme faciliter une reconquête de la rive droite, qui reste un problème extrêmement difficile. En face du centre, l'espace est quasiment vide, pour le redynamiser et constituer un quartier, il faudrait au moins 10.000 habitants, seuil pour amortir les lourds équipements. Seulement la demande n'est pas aussi importante : l'expansion démographique, si elle existe, ne devrait amener qu'environ 7.000 habitants sur la ville de Bordeaux d'ici 2005, la réhabilitation de centre devant en absorber la majorité. Il faut donc envisager un déplacement de population qui pourrait venir de l'agglomération. Pour cela, Bordeaux a besoin d'un fort pouvoir d'attraction pour rééquilibrer le rapport de force avec la périphérie et envisager un noyau de développement interne et dynamique à la mesure de ses ambitions.
> Nantes : l'émergence de pôles secondaires de centralité
A Nantes, le thème de la centralité est un sujet très discuté. Déjà depuis quelques années, la municipalité a évité de concentrer toutes les fonctions centrales au même endroit. L'aménagement de l'île Beaulieu même s'il était trop ambitieux, a permis une certaine dispersion. Plus récemment, la "reconquête" du quartier de la Madeleine avec la construction du Palais des Congrès et d'activités tertiaires a représenté un premier pas vers le fleuve. La ville a bien compris qu'il n'était pas possible d'amener le centre-ville au bord du fleuve, la morphologie de la ville ne s'y prêtant plus, la Loire ayant été repoussée. Elle s'efforce de trouver des solutions notamment avec la constitution d'éléments centraux, dont l'accès au centre est facilité par des points d'accroche et la desserte rapide du tramway.
Pour l'instant le programme "Une nouvelle Centralité pour Nantes" ne prend pas vraiment en compte la Loire. Le grand axe Nord-Sud du Boulevard des Cinquante Otages s'achève sur l'île Feydeau, où l'eau a été remplacée par une "coulée verte". L'accès au fleuve, pourtant proche, est rendu difficile par le vaste terre-plein de la Petite Hollande où s'étalent des voies rapides et un immense parking. Pourtant, un certain rapprochement du fleuve et du centre semble possible, d'autant que le quartier de la Prairie-au-Duc offre des opportunités d'aménagement manifestes. La probable réalisation de la Cité Judiciaire et d'une passerelle piétonne au-dessus du fleuve permettra un début de réappropriation. La réalisation d'un pôle de centralité abritant des fonctions métropolitaines peut s'appuyer sur de grands points pour acquérir une image forte, un pouvoir d'attraction et une bonne accessibilité : le tramway qui longe la Loire, un espace ouvert qui offre un panorama sur le bras de la Madeleine, la butte Sainte-Anne et les façades architecturales du quai de la Fosse, la présence symbolique des anciens chantiers navals et la proximité de la Médiathèque et de la Piscine qui peuvent servir de points d'accroche ludiques et culturels avec le centre-ville.
2.3.2.2. Renouveau et identité portuaires
Même si le port a délaissé ces espaces, la disparition complète de la vie portuaire n'est pas évidente. Des sites actifs existent toujours, certaines activités sont compatibles avec les caractéristiques des installations en site urbain, et le port a de plus en plus intérêt à rester en contact avec la ville.
Avant de penser à toute reconversion irréversible à des fins urbaines, il faut d'abord penser aux potentialités pour des usages portuaires. «L'effacement de la vie portuaire n'est pas toujours une issue inéluctable, car les besoins des communautés portuaires ne se résument pas à des postes en eau profonde et à de vastes terminaux pour les superpétroliers[49]». Il est encore trop tôt pour jugé de l'obsolescence définitive des installations. Certaines activités, qui commencent tout juste à se développer, peuvent être intéressantes pour les deux ports :
- le cabotage à vocation européenne : Nantes et Bordeaux sont desservies par de grands fleuves. Le développement des activités fluviales peut considérablement renforcer leur arrière-pays. Dans les ports nordiques, l'alternative du cabotage a déjà connu quelques succès à Hull, Anvers (Kattendijk), Rotterdam (Rijnhaven, Maashaven). A Gand, la revitalisation à des fins portuaires a bénéficié de mesures incitatrices : l'Etat belge supportant 80% du coût des infrastructures pour les rénovations portuaires contre 60% pour les constructions en site neuf.
- les croisières : Les deux ports peuvent offrir des sites d'escales intéressants et proches du centre-ville. Cette activité a déjà permis à certains ports anciens de retrouver une raison d'être : Vieux port de Québec, bénéficiant de la croissance du marché américain.
- le tertiaire portuaire : Il occupe une place croissante dans les activités de transit et nécessite un environnement urbain. La fonction commerciale des ports n'exige pas que des terminaux portuaires mais de véritables places maritimes s'appuyant sur des services, des compétences, des acteurs présents dans la ville.
Ces possibilités offrent de nombreux avantages : les équipements existants nécessitent moins d'investissements, le patrimoine foncier est utilisé et surtout le port garde ainsi un contact avec la ville. Les ports modernes ne peuvent se passer d'un environnement urbain pour des raisons tertiaires mais aussi parce qu'ils ont besoin d'un tissu social et culturel, sans lequel ils n'auraient aucune identité, seraient repliés sur eux-mêmes et se limiteraient à des espaces techniques fragiles.
Les ports ont encore tendance à oublier les villes et cherchent à rationaliser à tout prix la circulation des marchandises. Le plus souvent, le port se désengage car seul l'intéresse l'espace économiquement actif et il néglige l'entretien des installations dans les zones urbaines. Mais, est-ce son intérêt d'abandonner tous ces espaces à la ville qui s'empressera de réaménager selon ses intérêts et négligera sans doute les formes portuaires toujours existantes faute de moyens ?
Face à la concurrence actuelle, à la mondialisation et à l'homogénéisation des formes portuaires, il serait plutôt préférable aujourd'hui que les ports investissent leur patrimoine et soulignent leur spécificité pour appuyer leurs stratégies économiques. «Dès lors que l'histoire est présente, c'est-à-dire que l'acteur est conscient de son patrimoine, non en tant qu'ultime marchandise mais comme ressource pour se projeter dans l'avenir, la culture devient une arme économique, et le patrimoine un capital[50]».
Une forte présence portuaire dans la ville peut permettre un renforcement des communautés portuaires et une coalition des différents acteurs, pour une meilleure compétitivité collective. De plus, il est important de permettre à l'opinion publique une bonne compréhension des activités et des problèmes actuels. Pour cela, l'image mentale ne doit plus focaliser sur "l'âge d'or" du passé mais sur les nouvelles techniques et sur le dynamisme actuel et futur, qui peuvent être mis en valeur par des centres culturels portuaires et par des visites. La présence des friches et leur reconversion exclusivement urbaine laissent entendre que le port n'est plus un élément déterminant, la population ne se sent plus concernée ce qui empêche tout soutien et appui local. Un renouveau portuaire peut permettre au port d'acquérir une identité forte et favoriser une nouvelle identification des citadins donc de réunir des énergies et des forces autour de ses activités.
Un réaménagement qui négligerait le passé, peut être en contradiction avec les souhaits des populations et aboutir à un dysfonctionnement des projets mis en place, les habitants n'y trouvant pas de repère, ni de sentiment d'appartenance. Une prise en compte des traces du passé ne doit pas être seulement considérée comme nostalgique, c'est aussi une base indispensable pour envisager un avenir, qui ne soit pas uniquement imaginé selon des désirs et des illusions.
2.3.1.2. Les modèles
En matière de réaménagement des espaces portuaires délaissés, de nombreux exemples, pour la plupart étrangers, constituent des voies à explorer, des modèles plus ou moins réussis. Il ne faut pas pour autant gommer la spécificité de chaque cas; ce qui peut réussir quelque part n'est pas garant de succès dans un autre contexte. Mais ces exemples, ramené à l'échelle des deux villes étudiées, peuvent constituer une palette de choix et donc animer le débat et éviter des erreurs.
Dès la fin des années 1950, on assiste aux Etats-Unis à l'émergence du réaménagement des waterfronts (Le secteur d'Union Wharf à Boston fait l'objet d'un projet de reconversion dès 1956). Un consensus s'établit pour accepter une délocalisation quasi totale et sans retour des activités maritimes et sur une réaffectation basée sur de nouvelles valeurs d'usages des sites. Le modèle qui s'impose est en rupture avec les fonctions antérieures et il privilégie essentiellement le tertiaire de bureaux, le commerce et le tourisme, avec un léger dosage résidentiel, limité à un habitat haut de gamme. Baltimore en est un très bon exemple, par la reconversion du Inner Harbor, on cherche à revitaliser l'ensemble de la downtown et à rehausser l'image de marque de la cité, avec pour objectif d'en faire une ville de congrès, durant toute l'année.
Montréal, au contraire, apparaît en rupture avec ce modèle tertiaire et spéculatif. L'opinion publique joue un grand rôle, avec des "consultations" déterminantes durant les années 1980. Après une décennie de réflexion, de projets et d'intenses consultations, les grandes lignes du réaménagement sont basées sur un refus des constructions nouvelles à fortes densités et une priorité donnée aux espaces publics notamment aux équipements sportifs, récréatifs, culturels avec en plus la conservation des héritages industriels et maritimes.
En Europe occidentale, le relais d'innovation a été l'Angleterre, où la précocité de l'ère industrielle a nourri des friches considérables. La fermeture des docks du port de Londres commence en 1967-1969 (East India, St Katharine, London Docks). Après une décennie de conflit entre l'Etat et les collectivités publiques, l'opération des London Docklands commence dans les années 1980 sous l'impulsion du gouvernement. Elle reste un modèle européen de taille (2.200 ha). La reconversion s'effectue sur trois thèmes majeurs: introduction volontariste d'activités industrielles légères (Enterprise Zone qui bénéficie d'avantages fiscaux), la création d'une seconde City, sur Canary Wharf (bureaux, commerces, hôtels) et la réalisation de lotissements résidentiels, généralement neufs. L'équilibre entre résidence et emploi est recherché, mais la mutation est totale sur le plan socio-professionnel avec un fort phénomène de gentrification.
Peu à peu, les approches et les réalisations ont évolué en fonction des changements de conjoncture économique mais aussi avec un approfondissement de la réflexion sur le rôle que pouvait jouer ces espaces :
- Absence de prise de conscience : construction de voies rapides, de parkings requis par l'augmentation croissante de la circulation automobile. La coupure entre l'eau et la ville est conservée : axes autoroutiers dans les années 1950 à Washington, Toronto...
- Espaces verts et équipements récréatifs (années 1950 et 1960 aux Etats-Unis). Avec une logique simple d'embellissement et d'ouverture sur le fleuve : esplanades (Montréal), véritables parcs (Toronto, Boston) ou modestes linéaires piétonniers.
- La récession qui commence au milieu des années 1970 rend prioritaire la création d'activités. Les opérations sont intégrées dans des projets multi-fonctionnels (Baltimore), générateurs d'emplois et relevant surtout du tertiaire commercial.
- Fin de la monovalence et pluralité d'objectifs. A partir des années 1980, on voit apparaître non seulement un effort de créations d'emplois dans les quartiers anciens, mais plus encore de véritables stratégies à l'échelle de l'agglomération pour la régénération des quartiers centraux. On privilégie une large variété d'usages, avec un mixage de tertiaire, de résidentiel et de récréatif. Les acteurs commencent réellement à prendre conscience des avantages qu'ils peuvent tirer à travers ces opérations de réaménagement.
Toutes les opérations ont vu le jour grâce à une volonté politique et à des outils d'intervention. Aux Etats-Unis, le programme H.U.D. (ministère fédéral du Housing and Urban Department) a largement financé des opérations de waterfronts. De plus, les villes ont bénéficié du dynamisme des milieux d'affaires locaux. A Baltimore, à partir de 1964, l'opération de reconversion programmée sur 30 ans est confiée à une société d'aménagement privée, sans but lucratif, concessionnaire de la municipalité : Inner Harbor Management Inc. Dans ce partenariat, la collectivité locale s'efforce de promouvoir des objectifs d'intérêt général, comme le libre accès des berges au public, mais elle s'attache aussi à favoriser les investissements privés. Pour Londres, la responsabilité de la reconversion est confiée à un établissement public (London Docks Development Corporation) qui a reçu mission du gouvernement Thatcher d'accueillir majoritairement les investissements du secteur privé. Une planification non-volontariste sur simples objectifs est suivie. L'établissement public a la responsabilité d'établir un maximum de cohérence entre les propositions émanant des promoteurs publics et surtout privés.
En France, où aucune grande opération de reconversion n'a encore été engagée, les responsabilités demeurent très partagées entre des décideurs publics dont les logiques sont assez divergentes (cf. § 2.1.1.1.). Le secteur privé n'a guère encore manifesté l'intérêt que l'on observe chez les promoteurs nord-américains, excepté pour quelques classiques projets de marinas et d'équipements touristiques.
Que peut-on tirer de ces expériences ? L'évaluation de ces opérations est un exercice difficile car elles sont encore trop récentes pour offrir tous les éléments nécessaires à l'établissement d'un bilan. Elles intègrent le plus souvent des programmes variés avec l'association d'investissements publics et privés. Des opérations pilotes de prestige et/ou la mise en valeur d'éléments du patrimoine permettent d'effacer l'image négative des friches. La priorité est donnée à la création d'activités, pour rentabiliser les investissements et pour créer une animation urbaine indispensable. Elles ont toutes représentées des prises de risque importantes et l'augmentation actuelle de la demande sur ces espaces et l'existence d'un marché foncier représentent tout de même un certain succès.
Mais le problème des répercussions est encore peu maîtrisé. Le plus grand danger est celui d'une reconversion spéculative à court terme, qui peut déboucher sur des erreurs d'appréciations sur lesquelles on ne peut revenir. Par exemple, l'exemple londonien est un des plus controversé puisqu'il a eu de lourdes conséquences socio-économiques avec une recomposition brutale, excessive et exclusive (gentrification). De plus, le Port aurait pu conserver des trafics, notamment de divers conventionnel, dans certains bassins (cf. § 2.3.2.2.). Il faut donc essayer de porter un point de vue critique sur ce qui a déjà été fait pour éviter les mêmes erreurs. «Le problème est que ces réalisations ont été présentées le plus souvent comme exemplaires et que nombre de "développeurs" ne songent qu'à exporter hors contexte un "modèle" encore présenté aux élus comme la panacée, alors qu'il s'agit du pur produit d'une idéologie aujourd'hui rejetée[47]». Le temps de réflexion est primordial, afin d'éviter les clichés, le déjà-vu (CLARK, 1988), de composer avec ses moyens et de ne pas être aveuglé par des ambitions démesurées.
2.3.2. Ambitions urbaines et portuaires
Les opérations de réaménagement sont plus souvent motivées par les ambitions des acteurs qui voient dans les friches portuaires, des endroits stratégiques où ils peuvent concentrer de nouvelles activités et de nouveaux équipements répondant aux demandes actuelles et à une volonté de développement. La revitalisation économique des friches se situe dans une optique de renouveau. Les acteurs imaginent des usages en fonction de l'avenir, de la dimension qu'ils veulent se donner. Cette seule approche est assez risquée, les ambitions de développement étant souvent démesurées par rapport aux réelles possibilités. Cela peut aboutir à des interventions trop ambitieuses, qui seraient un reflet des fantasmes des décideurs, et qui fonctionneraient mal. Il est important de mesurer les réelles possibilités de réussite d'un réaménagement et de ne pas en voir en lui le remède qui pourrait régler tous les problèmes. Il est préférable de partir de l'existant, de fixer des objectifs réalistes et de trouver un équilibre entre le rêve et la réalité.
2.3.2.1. Nouvelles centralité et image urbaines
Le nouveau contexte économique postindustriel basé sur le tertiaire et l'information fait des villes des lieux d'échanges, de flux. La ville base aujourd'hui son développement sur la concentration et l'attraction de fonctions tertiaires supérieures pour devenir un espace transactionnel important et dynamique, avec l'ambition d'accroître son espace d'influence, de se hausser dans la hiérarchie des systèmes urbains régionaux ou nationaux et de devenir une véritable métropole.
Les municipalités portent aujourd'hui beaucoup d'intérêt à un retour vers les centres et à la notion de centralité, identifiée par l'intensité de flux matériels (populations actives, visiteurs, touristes...) et immatériels (capitaux, informations). Elles veulent renforcer et recomposer le centre-ville existant en véritable centre d'agglomération qui doit concentrer les fonctions métropolitaines majeures et les attractions touristiques.
Les friches portuaires entrent en contradiction avec cette image saine, moderne et dynamique. Mais elles s'avèrent un terrain idéal pour abriter les nouvelles fonctions centrales. Le centre existant est proche, les terrains disponibles sont nombreux et l'eau offre un cadre agréable et naturel.
Pour être attractive, la ville doit améliorer son image. Il s'agit de passer d'une image de ville centrée sur sa fonction portuaire et sur son caractère populaire à une image de métropole européenne tournée vers la gestion financière, le tourisme d'affaires, et s'appuyant sur une vie culturelle active. L'aspect esthétique prend une grande importance et les municipalités s'efforcent de mettre en valeur leurs atouts architecturaux et paysagers. A ce sujet, l'eau recèle de grandes potentialités. Elle permet des effets de miroir et de perspectives. Le front d'eau peut servir de vitrine urbaine, représentant la nouvelle centralité. Les berges peuvent concentrer des équipements touristiques importants et être le cadre de manifestations ludiques, grosses polarisatrices de flux de fréquentation intra-urbains. L'image ainsi offerte cadre avec trois objectifs : une ville agréable au bord de l'eau, une ville ludique et une métropole moderne. L'espace portuaire délaissé devient dans cette optique un espace de reconquête essentiel pour la ville.
Aujourd'hui, les chances de développement économique des villes se basent de plus en plus sur une forte identité culturelle et une qualité esthétique. Le cadre de vie pèse lourd dans les choix économiques. Une ville sans beauté et sans âme serait handicapée. Le réaménagement des anciens espaces portuaires peut apporter un second souffle, une redéfinition de la ville en fonction des attentes d'une société moderne de temps libre et de loisirs, dans l'optique de la notion d'urban leisure economy, correspondant à des valeurs ludiques et de consommation :
- L'environnement : On recherche aujourd'hui une certaine symbiose entre la ville et la nature. Ces dernières années, sont apparues des sensibilités collectives nouvelles sur les thèmes de l'environnement, de la qualité de vie et de l'eau. Le réaménagement peut répondre à ces attentes à travers une valorisation et une ouverture sur l'eau avec la création d'espaces publics : promenades, parcs, traversées en bateaux. Ce thème peut être aussi utilisé par le marketing, trouvant des thèmes "vendeurs" dans l'image maritime (île Sainte-Anne).
- La technologie : La ville se doit d'abriter des secteurs technologiques importants en relation avec le secteur tertiaire et industriel, pour conforter son dynamisme et sa modernité. Les activités scientifiques, de recherche, d'enseignement supérieur peuvent être regroupées dans des technopoles intégrées à la nouvelle centralité.
- Les fonctions tertiaires : Leur nombre important est synonyme pour la ville de commandement économique et de puissance. L'implantation de directions administratives, de sièges sociaux, de centre de congrès, d'activités commerciales peuvent permettre une influence accrue et une vocation nationale voire internationale. Pour les villes, il s'agit de remplacer les traces du secteur productif, qui n'est plus synonyme de puissance et relégué à la périphérie, en un foisonnement de services concentrant toutes les chances de développement économique.
- Les activités culturelles : Elles participent à la nouvelle dynamique des villes, à la fois comme pôle d'attraction touristique et comme outil économique. Les villes portuaires ont intérêt à faire valoir leur spécificité culturelle pour être attractives, pour ne pas devenir des métropoles régionales indistinctes et sans éclat. La notion de patrimoine notamment en ce qui concerne les friches portuaires prend ici un rôle important, notamment pour Nantes et Bordeaux, situées en périphérie de l'espace économique européen. «Le développement patrimonial des cités atlantiques est peut être la seule stratégie réaliste pour l'avenir de ce territoire confronté aux nombreux défis géopolitiques, économiques et technologiques qui ne semblent pas lui laisser à terme une place de choix[48]».
Tous ces éléments sont nécessaires mais non suffisants pour créer de la centralité à la place des friches portuaires. Si l'on veut que celle-ci soit permanente et significative, le réaménagement exige des éléments forts et nombreux pour entretenir les activités et les flux de fréquentation. Il faut toujours penser aux articulations avec la centralité existante et prévoir des moyens d'échanges près des berges : gares ferroviaires et maritimes, transports en public. L'image ne suffit pas, il est important d'y concentrer une large gamme d'activités et de logements polarisant un grand nombre d'employés et d'habitants en combinaison avec le tourisme.
> Bordeaux : un élargissement de la centralité vers le fleuve
Bordeaux a l'ambition de devenir une grande métropole. Pour cela elle peut s'appuyer sur une agglomération importante (plus de 700.000 habitants), une large aire d'influence, une histoire et des qualités architecturales certaines. Mais la ville de Bordeaux en elle-même ne compte que 210.000 habitants, ce qui est peu et a des conséquences financières. Dans ce cas, un mouvement de retour vers le centre est indispensable. Toute une partie de son territoire (la rive droite) forme actuellement un immense vide au coeur de l'agglomération, c'est en réoccupant cet espace et en intégrant le fleuve que Bordeaux veut renforcer son centre et accroître ses activités et sa population.
Les berges et leurs valorisations apparaissent comme un moyen de recentrage. Les bords du fleuve offrent des richesses touristiques évidentes et peuvent servir de "vitrine" à la ville. La rive droite actuellement désolée peut être destinée à une revalorisation totale intégrant l'implantation de nombreuses activités tertiaires. Mais actuellement le problème réside dans la maîtrise du flux de véhicules qui empruntent les quais et dans l'insuffisance des points de franchissement du fleuve.
Des efforts commencent à être fait avec le récent "Plan Lumière" dont l'éclairage de la Place de la Bourse offrent un spectacle nocturne grandiose. L'aménagement des anciens quartiers Saint-Pierre et Saint-Michel depuis le début des années 1980 n'a pour l'instant pas assez pris en compte les berges mais il peut constituer un point d'ancrage avec le centre existant. Mais à Bordeaux, la maîtrise de la centralité est difficile du fait de la largeur du fleuve et surtout de l'existence du centre directionnel de Mériadeck qui rend problématique toute dispersion des éléments de centralité.
La municipalité pourrait dans un premier temps essayer d'intégrer les terre-pleins des quais de la rive gauche et en aménager l'accès. Une animation en bord de fleuve pourrait à terme faciliter une reconquête de la rive droite, qui reste un problème extrêmement difficile. En face du centre, l'espace est quasiment vide, pour le redynamiser et constituer un quartier, il faudrait au moins 10.000 habitants, seuil pour amortir les lourds équipements. Seulement la demande n'est pas aussi importante : l'expansion démographique, si elle existe, ne devrait amener qu'environ 7.000 habitants sur la ville de Bordeaux d'ici 2005, la réhabilitation de centre devant en absorber la majorité. Il faut donc envisager un déplacement de population qui pourrait venir de l'agglomération. Pour cela, Bordeaux a besoin d'un fort pouvoir d'attraction pour rééquilibrer le rapport de force avec la périphérie et envisager un noyau de développement interne et dynamique à la mesure de ses ambitions.
> Nantes : l'émergence de pôles secondaires de centralité
A Nantes, le thème de la centralité est un sujet très discuté. Déjà depuis quelques années, la municipalité a évité de concentrer toutes les fonctions centrales au même endroit. L'aménagement de l'île Beaulieu même s'il était trop ambitieux, a permis une certaine dispersion. Plus récemment, la "reconquête" du quartier de la Madeleine avec la construction du Palais des Congrès et d'activités tertiaires a représenté un premier pas vers le fleuve. La ville a bien compris qu'il n'était pas possible d'amener le centre-ville au bord du fleuve, la morphologie de la ville ne s'y prêtant plus, la Loire ayant été repoussée. Elle s'efforce de trouver des solutions notamment avec la constitution d'éléments centraux, dont l'accès au centre est facilité par des points d'accroche et la desserte rapide du tramway.
Pour l'instant le programme "Une nouvelle Centralité pour Nantes" ne prend pas vraiment en compte la Loire. Le grand axe Nord-Sud du Boulevard des Cinquante Otages s'achève sur l'île Feydeau, où l'eau a été remplacée par une "coulée verte". L'accès au fleuve, pourtant proche, est rendu difficile par le vaste terre-plein de la Petite Hollande où s'étalent des voies rapides et un immense parking. Pourtant, un certain rapprochement du fleuve et du centre semble possible, d'autant que le quartier de la Prairie-au-Duc offre des opportunités d'aménagement manifestes. La probable réalisation de la Cité Judiciaire et d'une passerelle piétonne au-dessus du fleuve permettra un début de réappropriation. La réalisation d'un pôle de centralité abritant des fonctions métropolitaines peut s'appuyer sur de grands points pour acquérir une image forte, un pouvoir d'attraction et une bonne accessibilité : le tramway qui longe la Loire, un espace ouvert qui offre un panorama sur le bras de la Madeleine, la butte Sainte-Anne et les façades architecturales du quai de la Fosse, la présence symbolique des anciens chantiers navals et la proximité de la Médiathèque et de la Piscine qui peuvent servir de points d'accroche ludiques et culturels avec le centre-ville.
2.3.2.2. Renouveau et identité portuaires
Même si le port a délaissé ces espaces, la disparition complète de la vie portuaire n'est pas évidente. Des sites actifs existent toujours, certaines activités sont compatibles avec les caractéristiques des installations en site urbain, et le port a de plus en plus intérêt à rester en contact avec la ville.
Avant de penser à toute reconversion irréversible à des fins urbaines, il faut d'abord penser aux potentialités pour des usages portuaires. «L'effacement de la vie portuaire n'est pas toujours une issue inéluctable, car les besoins des communautés portuaires ne se résument pas à des postes en eau profonde et à de vastes terminaux pour les superpétroliers[49]». Il est encore trop tôt pour jugé de l'obsolescence définitive des installations. Certaines activités, qui commencent tout juste à se développer, peuvent être intéressantes pour les deux ports :
- le cabotage à vocation européenne : Nantes et Bordeaux sont desservies par de grands fleuves. Le développement des activités fluviales peut considérablement renforcer leur arrière-pays. Dans les ports nordiques, l'alternative du cabotage a déjà connu quelques succès à Hull, Anvers (Kattendijk), Rotterdam (Rijnhaven, Maashaven). A Gand, la revitalisation à des fins portuaires a bénéficié de mesures incitatrices : l'Etat belge supportant 80% du coût des infrastructures pour les rénovations portuaires contre 60% pour les constructions en site neuf.
- les croisières : Les deux ports peuvent offrir des sites d'escales intéressants et proches du centre-ville. Cette activité a déjà permis à certains ports anciens de retrouver une raison d'être : Vieux port de Québec, bénéficiant de la croissance du marché américain.
- le tertiaire portuaire : Il occupe une place croissante dans les activités de transit et nécessite un environnement urbain. La fonction commerciale des ports n'exige pas que des terminaux portuaires mais de véritables places maritimes s'appuyant sur des services, des compétences, des acteurs présents dans la ville.
Ces possibilités offrent de nombreux avantages : les équipements existants nécessitent moins d'investissements, le patrimoine foncier est utilisé et surtout le port garde ainsi un contact avec la ville. Les ports modernes ne peuvent se passer d'un environnement urbain pour des raisons tertiaires mais aussi parce qu'ils ont besoin d'un tissu social et culturel, sans lequel ils n'auraient aucune identité, seraient repliés sur eux-mêmes et se limiteraient à des espaces techniques fragiles.
Les ports ont encore tendance à oublier les villes et cherchent à rationaliser à tout prix la circulation des marchandises. Le plus souvent, le port se désengage car seul l'intéresse l'espace économiquement actif et il néglige l'entretien des installations dans les zones urbaines. Mais, est-ce son intérêt d'abandonner tous ces espaces à la ville qui s'empressera de réaménager selon ses intérêts et négligera sans doute les formes portuaires toujours existantes faute de moyens ?
Face à la concurrence actuelle, à la mondialisation et à l'homogénéisation des formes portuaires, il serait plutôt préférable aujourd'hui que les ports investissent leur patrimoine et soulignent leur spécificité pour appuyer leurs stratégies économiques. «Dès lors que l'histoire est présente, c'est-à-dire que l'acteur est conscient de son patrimoine, non en tant qu'ultime marchandise mais comme ressource pour se projeter dans l'avenir, la culture devient une arme économique, et le patrimoine un capital[50]».
Une forte présence portuaire dans la ville peut permettre un renforcement des communautés portuaires et une coalition des différents acteurs, pour une meilleure compétitivité collective. De plus, il est important de permettre à l'opinion publique une bonne compréhension des activités et des problèmes actuels. Pour cela, l'image mentale ne doit plus focaliser sur "l'âge d'or" du passé mais sur les nouvelles techniques et sur le dynamisme actuel et futur, qui peuvent être mis en valeur par des centres culturels portuaires et par des visites. La présence des friches et leur reconversion exclusivement urbaine laissent entendre que le port n'est plus un élément déterminant, la population ne se sent plus concernée ce qui empêche tout soutien et appui local. Un renouveau portuaire peut permettre au port d'acquérir une identité forte et favoriser une nouvelle identification des citadins donc de réunir des énergies et des forces autour de ses activités.
Conclusion de la deuxième partie
Le mécanisme de réaménagement mis à jour se révèle complexe, long et incertain. La ville et le port veulent aujourd'hui se donner le temps de réfléchir, pour ne pas commettre d'erreurs et pour ne pas passer à côté d'une opportunité unique.
A Nantes et à Bordeaux, la réflexion a débuté depuis environ une décennie, mais elle a surtout été entreprise par les municipalités qui veulent récupérer ces espaces. Les deux Ports Autonomes ont pour l'instant des difficultés à distinguer l'avantage qu'ils auraient à développer des activités sur les sites en milieu urbain, car ils doivent faire face à beaucoup d'autres priorités avec des moyens limités. Les villes semblent aujourd'hui plus disponibles et plus contraintes à intervenir assez rapidement.
Les ports ont trop tendance à céder ces terrains aux villes qui les réaménagent souvent en gommant toute trace portuaire si ce n'est dans une optique passéiste. Mais les municipalités n'ont pas vraiment intérêt à se débarrasser complètement de cet "occupant encombrant", s'éloignant vers aval. Les ports dynamisent les régions, créent des emplois, génèrent des flux. Une présence portuaire est un atout de taille pour les ambitions métropolitaines. Dans cette perspective, Nantes veut s'associer avec Saint-Nazaire, ainsi le Port Autonome apparaît comme une structure commune privilégiée, les ambitions urbaines et portuaires ne sont donc pas complètement contradictoires. Les friches portuaires représentent le meilleur espace possible pour esquisser de nouvelles relations entre la ville et le port. Un rapprochement des deux organismes minimiserait leurs faiblesses respectives face au réaménagement et permettrait la mise en place d'un système combiné plus valide et plus garant de succès.
A Nantes et à Bordeaux, la réflexion a débuté depuis environ une décennie, mais elle a surtout été entreprise par les municipalités qui veulent récupérer ces espaces. Les deux Ports Autonomes ont pour l'instant des difficultés à distinguer l'avantage qu'ils auraient à développer des activités sur les sites en milieu urbain, car ils doivent faire face à beaucoup d'autres priorités avec des moyens limités. Les villes semblent aujourd'hui plus disponibles et plus contraintes à intervenir assez rapidement.
Les ports ont trop tendance à céder ces terrains aux villes qui les réaménagent souvent en gommant toute trace portuaire si ce n'est dans une optique passéiste. Mais les municipalités n'ont pas vraiment intérêt à se débarrasser complètement de cet "occupant encombrant", s'éloignant vers aval. Les ports dynamisent les régions, créent des emplois, génèrent des flux. Une présence portuaire est un atout de taille pour les ambitions métropolitaines. Dans cette perspective, Nantes veut s'associer avec Saint-Nazaire, ainsi le Port Autonome apparaît comme une structure commune privilégiée, les ambitions urbaines et portuaires ne sont donc pas complètement contradictoires. Les friches portuaires représentent le meilleur espace possible pour esquisser de nouvelles relations entre la ville et le port. Un rapprochement des deux organismes minimiserait leurs faiblesses respectives face au réaménagement et permettrait la mise en place d'un système combiné plus valide et plus garant de succès.
[43] TUNBRIDGE, J (1988) "Policy convergence on the waterfront ? A comparative assessment of North American revitalisation strategies" in Revitalising the waterfront; Belhaven Press; Londres; p: 67-91
[44] VEILLETET, P (1989) Bords d'eaux; éd; Arléa; Paris; 167 p.
[45] CHALINE, C (1993) La ville à la reconquête des espaces portuaires délaissés, comparaisons et évaluations internationales (vers un observatoire de la transformation des villes-ports); 4 tomes; déc. 1993; LEDALOR; Paris XII; 300 p.
[46] Presse-Océan du 26 oct. 1990
[47] CHARLIER, J (1993) "Les stratégies alternatives de requalification des anciens bassins à des fins portuaires. Les exemples de Gand, d'Anvers et de Rotterdam" in Proceedings (Third International Conference "Cities & Ports" - Genoa 19-22 nov 1991); Gènes; p:125-128
[48] GUESNIER, B (1993) dans un rapport sur le patrimoine de la façade atlantique; Institut d'Economie Régionale, Université de Poitiers; cité par BAUDOIN & COLLIN (1993)
[49] CHARLIER, J (1993) "Les stratégies alternatives de requalification des anciens bassins à des fins portuaires. Les exemples de Gand, d'Anvers et de Rotterdam" in Proceedings (Third International Conference "Cities & Ports" - Genoa 19-22 nov 1991); Gènes; p:125-128
[50] BAUDOIN, T & COLLIN, M (1993) Culture des villes portuaires et mondialisation de l'économie; Rapport de recherche pour le plan Construction & Architecture programme "Le Port et la Ville"; Laboratoire d'Histoire Maritime, Université de Paris Sorbonne; 87 p.
[44] VEILLETET, P (1989) Bords d'eaux; éd; Arléa; Paris; 167 p.
[45] CHALINE, C (1993) La ville à la reconquête des espaces portuaires délaissés, comparaisons et évaluations internationales (vers un observatoire de la transformation des villes-ports); 4 tomes; déc. 1993; LEDALOR; Paris XII; 300 p.
[46] Presse-Océan du 26 oct. 1990
[47] CHARLIER, J (1993) "Les stratégies alternatives de requalification des anciens bassins à des fins portuaires. Les exemples de Gand, d'Anvers et de Rotterdam" in Proceedings (Third International Conference "Cities & Ports" - Genoa 19-22 nov 1991); Gènes; p:125-128
[48] GUESNIER, B (1993) dans un rapport sur le patrimoine de la façade atlantique; Institut d'Economie Régionale, Université de Poitiers; cité par BAUDOIN & COLLIN (1993)
[49] CHARLIER, J (1993) "Les stratégies alternatives de requalification des anciens bassins à des fins portuaires. Les exemples de Gand, d'Anvers et de Rotterdam" in Proceedings (Third International Conference "Cities & Ports" - Genoa 19-22 nov 1991); Gènes; p:125-128
[50] BAUDOIN, T & COLLIN, M (1993) Culture des villes portuaires et mondialisation de l'économie; Rapport de recherche pour le plan Construction & Architecture programme "Le Port et la Ville"; Laboratoire d'Histoire Maritime, Université de Paris Sorbonne; 87 p.